Comment Sam Altman veut concurrencer Nvidia
Et aussi: Apple cède face à Bruxelles - Epic Games ne baisse pas les bras
Sam Altman cherche des milliards de dollars pour concurrencer Nvidia
Le projet n’avait pas plu au conseil d’administration d’OpenAI, expliquant en partie l’éviction brutale de Sam Altman fin novembre. De retour à la tête du concepteur de ChatGPT, l’entrepreneur ne l’a pourtant pas abandonné. Selon l’agence Bloomberg, il cherche toujours à lever des milliards de dollars auprès d’investisseurs pour se lancer dans les puces dédiées à l’intelligence artificielle générative. Il n’ambitionne pas seulement de concevoir des accélérateurs capables de rivaliser avec ceux de Nvidia, devenus indispensables pour entraîner les derniers modèles d’IA. Il rêve aussi de les produire, en déployant son propre réseau d’usines. Un objectif encore plus compliqué à atteindre. Et qui va nécessiter encore plus de capitaux – probablement des dizaines de milliards de dollars.
Discussions avec Microsoft – Pour financer ses ambitions, Sam Altman a récemment mené des discussions avec G42, une firme tentaculaire financée par le gouvernement d’Abou Dhabi. Il a également contacté le conglomérat japonais Softbank, qui a promis l’été dernier de repartir à l’offensive après avoir dû réduire drastiquement ses investissements dans le secteur technologique. Et il a discuté de son idée avec Microsoft, le premier actionnaire d’OpenAI, avec lequel il entretient d’excellentes relations. Ces investisseurs potentiels ne seront pas seulement attirés par le nouveau statut vedette de Sam Altman. Ils le seront aussi par la forte croissance attendue du marché, qui pourrait passer de 45 milliards de dollars en 2023 à 400 milliards en 2027, selon les estimations d’AMD, qui vient de lancer sa première puce dédiée à l’IA.
OpenAI comme client – Le projet de Sam Altman ne semble pas lié à OpenAI – comme son projet de nouvelle catégorie d’appareil électronique dopé à l’IA générative, pour lequel il s’est associé avec Jony Ive, l’ancien designer star d’Apple. Mais il est fort probable que le concepteur de ChatGPT devienne le principal client de cette nouvelle entreprise, avec laquelle il partagera le même patron. Comme tous les acteurs du secteur, la start-up est en effet dépendante de sa capacité à décupler sa puissance informatique pour entraîner des modèles toujours plus grands. Or, Nvidia et ses quelques rivaux ne parviennent pas à produire suffisamment de puces pour satisfaire la demande. OpenAI doit également composer avec les avancées technologiques de ces fabricants, sans pouvoir véritablement influer sur les améliorations à apporter.
Partenariat avec TSMC ? – Suivant la même logique que Sam Altman, Google, Microsoft ou encore Amazon conçoivent aussi leur propre accélérateur d’IA. Mais ils ont opté pour un modèle “fabless”, c’est-à-dire sans usine. Ils sous-traitent donc la fabrication au géant taïwanais TSMC. La raison est simple: bâtir un site de production demande des dizaines de milliards, de dollars d’investissements, des compétences technologiques de pointe et une main d’œuvre ultra-qualifiée. Ce choix présente cependant une limite: une dépendance aux capacités de production de TSMC, parfois limitées pour les composants les plus avancés. Pour limiter les investissements et les risques, Sam Altman discute également d’un partenariat avec le fondeur taïwanais, et avec ses grands rivaux Intel et Samsung.
Pour aller plus loin:
– Nvidia soupçonné de pratiques anticoncurrentielles
– Pourquoi Microsoft et OpenAI sont dans le collimateur des gendarmes antitrust
Dans le viseur de Bruxelles, Apple se résout à mettre fin au monopole d’Apple Pay
Apple s’est fait une raison. En Europe, son monopole sur les paiements mobiles depuis un iPhone ne pourra pas être préservé. Celui-ci n’a pas résisté à la procédure antitrust lancée au printemps 2022 par la Commission européenne et au Digital Markets Act, la nouvelle réglementation communautaire sur le numérique, qui va entrer en vigueur début mars. Au lieu de poursuivre la bataille pour maintenir le statu quo, le groupe à la pomme propose désormais à Bruxelles d’ouvrir à d’autres acteurs l’accès à la puce NFC, qu’il réserve jusqu’à présent à son application Apple Pay. Cela devrait favoriser l’émergence de véritables solutions rivales, conçues notamment par les banques et les spécialistes du paiement en ligne. Une concession qui, espère Apple, pourrait lui permettre de réduire ou d’éviter une amende.
Commissions – Depuis son lancement en 2014, Apple Pay est l’unique portefeuille mobile à pouvoir utiliser la puce NFC, la technologie qui permet de régler des achats sans contact dans les magasins. Ce monopole lui permet de compter plusieurs centaines de millions d’utilisateurs. Et d’engranger d’importantes commissions. Il est dénoncé depuis des années par des banques et des acteurs du paiement, comme le géant PayPal qui fait partie des sociétés qui avaient alerté Bruxelles. Plusieurs d’entre eux ont bien essayé de concevoir des solutions alternatives, ne reposant pas sur le NFC. Mais celles-ci sont bien moins pratiques à utiliser, ne leur permettant pas de vraiment rivaliser. D’autres portefeuilles, comme Paylib lancé par les banques françaises, sont uniquement disponibles sur Android.
Fin inéluctable – Pour sa défense, Apple a toujours mis en avant la sécurité et la protection des données de ses utilisateurs. Mais cet argument, aussi utilisé pour justifier le monopole de sa boutique d’applications App Store, n’a pas convaincu Bruxelles, qui y voit une potentielle pratique anticoncurrentielle limitant la compétition sur le marché des paiements mobiles. Face aux assauts européens, la fin du monopole d’Apple Pay sur iPhone semblait ainsi inéluctable. Non seulement l‘accès à la puce NFC pour les développeurs tiers fait partie des obligations prévues par le DMA. Mais il est aussi probable que la Commission européenne aurait imposé, même sans concessions proposées, des conditions supplémentaires dans le cadre d’une condamnation de la société de Cupertino au terme de sa procédure antitrust.
Influer sur les changements – Apple aurait pu contester devant la justice européenne. Par exemple, en soulignant que le DMA prévoit des exemptions si la sécurité est menacée. Mais ses dirigeants semblent désormais privilégier une approche plus constructive, afin d’influer sur la portée des changements. La société propose un système de validation des applications pouvant accéder au NFC. Celui-ci sera “juste, objectif, transparent et non discriminatoire”, promet-elle. Tout refus pourra être contesté devant un collège indépendant. Apple s’engage à ne pas prélever de frais. Et à laisser les utilisateurs choisir leur portefeuille par défaut – une autre obligation du DMA. Si elles sont acceptées, ces concessions s’appliqueront pour dix ans. Dans le cas contraire, Bruxelles pourra imposer des modifications encore plus grandes.
Pour aller plus loin:
– Comment Apple tente d’échapper au DMA européen
– Face aux avantages fiscaux d’Apple, Bruxelles obtient une première victoire
Face à Apple, Epic Games va de nouveau saisir la justice américaine
Apple et Epic Games vont jouer les prolongations. La semaine dernière, l’éditeur du jeu vidéo Fortnite a annoncé qu’il allait saisir la justice américaine pour contester la manière dont le groupe à la pomme a choisi d’appliquer un verdict rendu au printemps – et tout juste confirmé par la Cour suprême des États-Unis. Celui-ci avait remis en cause la pratique d’anti-steering, qui interdit aux applications de rediriger les utilisateurs vers un site Internet pour réaliser un achat ou souscrire à un abonnement. Mais Apple a choisi d’imposer des conditions très restrictives, limitant drastiquement les possibilités d’insérer des liens pour réaliser un achat externe. La société va aussi contraindre les développeurs à verser une commission de 12% ou de 27% sur chaque achat – soit seulement 3 points de moins. Ces règles visent à limiter l’impact de la décision de justice, en compliquant le processus d’achat externe pour les utilisateurs et en empêchant les applications de proposer des prix plus bas ailleurs.
Pour aller plus loin:
– Face à Epic, Google concède une défaite judiciaire retentissante
– Apple baisse ses commissions… mais pas pour Spotify et Epic
Crédit photos: Nvidia - Unsplash / CardMapr