Avec ses nouveaux iPhone, Apple teste l'appétit pour les smartphones "Gen AI"
C’est une nouvelle ère qui s’ouvre ce lundi soir pour Apple. Celle de l’intelligence artificielle générative, placée au cœur de ses derniers modèles d’iPhone. Le groupe à la pomme emboîte ainsi le pas aux autres fabricants, en particulier son grand rival Samsung, qui a effectué cette bascule en début d’année. Les plus optimistes lui prédisent déjà un “super cycle”, c’est-à-dire des ventes records, tirées par l’intérêt des consommateurs pour ChatGPT et autres services d’IA. Dans les faits, ce scénario semble cependant peu probable dans l’immédiat. D’ailleurs, les grands opérateurs se montrent beaucoup plus prudents. D’abord, parce que les différentes versions de l’iPhone 16 n’offriront pas de grands changements dans le design. Ensuite, parce que leurs fonctionnalités d’IA ne seront pas toutes disponibles au lancement.
Siri ressuscité – En juin, Apple a dévoilé les premières intégrations de l’IA générative – baptisées Apple Intelligence –, qui tourneront en partie en local, sans passer par le cloud. Celles-ci reposent en partie sur un Siri ressuscité. Le pionnier des assistants vocaux, très vite ringardisé, est désormais capable d’analyser ce qui est affiché sur l’écran et de réaliser des actions sur d’autres applications. L’IA alimentera aussi de nouveaux outils d’écriture, pour réécrire un texte dans un autre style, corriger les fautes d’orthographe ou rédiger un résumé. Elle permettra de créer des images et des émojis. Ou encore de supprimer certains éléments sur une photo. Le géant de Cupertino met également en avant un partenariat avec OpenAI, lui permettant d’ajouter la dernière version de ChatGPT pour les tâches trop complexes pour Siri.
Seulement en anglais – Cependant, une grande partie de ces fonctionnalités ne seront pas prêtes à temps. C’est le cas de l’intégration avec ChatGPT, des options de retouche photo et de création d’images, selon Bloomberg. Le déploiement d’Apple Intelligence s’étalera ainsi sur plusieurs mois, ce qui ne facilitera pas les campagnes marketing pour susciter l’enthousiasme du grand public. Par ailleurs, ces nouveaux services ne seront disponibles que sur les appareils configurés en anglais américain. Un lancement officiel en Europe n’est pas à l’ordre du jour, officiellement en raison d’incertitudes sur la réglementation. Même chose en Chine, où s’ajoutent des problématiques de censure. Au-delà, un doute subsiste: l’appétit des consommateurs pour ces fonctionnalités, d’autant plus s’ils doivent acheter un nouveau smartphone.
Premier test – Qu’importe, il est capital pour Apple d’occuper le terrain. Et de montrer qu’il n’est pas à la traîne sur le système Android de Google, malgré son retard à l’allumage. L’IA générative est considérée comme la plus importante révolution depuis le lancement des premiers smartphones. Elle devrait donc être le prochain relais de croissance sur un secteur en manque cruel d’innovations ces dernières années. La société californienne espère accélérer le cycle de remplacement des iPhone, en poussant ses clients à acheter par anticipation un modèle récent. Elle souhaite également les inciter à choisir les versions Pro, plus chères, qui sont les seules à bénéficier des fonctionnalités d’IA. Les performances commerciales de l’iPhone 16 constitueront ainsi un premier test pour ces nouveaux smartphones “Gen AI”.
Pour aller plus loin:
– Les fabricants de smartphones misent sur l’IA générative
– Le rebond du marché des smartphones se confirme… sauf pour Apple
Safe Superintelligence lève un milliard de dollars pour son IA "sûre"
Il aura fallu moins de trois mois à Ilya Sutskever pour rassembler un milliard de dollars. La semaine dernière, sa start-up Safe Superintelligence (SSI), officiellement lancée en juin, a annoncé cette gigantesque levée de fonds, menée sur la base d’une valorisation de 5 milliards. Des montants records pour un tour en phase d’amorçage, même pour un spécialiste de l’intelligence artificielle générative, qui s’expliquent par la réputation de son fondateur, ancien chercheur chez Google Brain et surtout ancien directeur scientifique d’OpenAI. Son objectif: développer une “super-intelligence sûre”, sans céder à des “pressions commerciales de court terme”, promet-il. En quelque sorte, il souhaite mener à bien la mission que s’était initialement fixée le concepteur de ChatGPT, désormais davantage focalisé vers la recherche de profits.
Approche prudente – Ilya Sutskever fait partie de la petite équipe à l’origine d’OpenAI. Il y incarne une approche plus prudente du développement de l’IA, souhaitant s’assurer que la technologie reste sous contrôle. Mais sa vision se heurte à celle de Sam Altman, le directeur général, qui veut, lui, avancer beaucoup plus vite. Ce conflit rampant éclate au grand jour fin 2023, quand le patron d’OpenAI est brutalement écarté, avant d’être réinstallé cinq jours plus tard. Celui-ci n’a depuis cessé d’affirmer son contrôle. Au détriment des impératifs sur la sécurité de l’IA. En mai, il a ainsi acté la dissolution, de l’équipe de “superalignement”, dirigée par Ilya Sutskever et chargée de vérifier que l’IA reste bien “alignée” avec les intérêts de l’humanité. Une décision qui a entraîné le départ du responsable… et la création de SSI.
But lucratif – Avec sa nouvelle start-up, Ilya Sutskever promet de ne pas suivre la même voie, en conservant la recherche et la sécurité au centre des préoccupations. Il assure ainsi que SSI se consacrera uniquement sur le développement d’une “super-intelligence”. Et donc qu’elle ne multipliera pas les lancements de produits pour satisfaire les intérêts financiers de ses investisseurs. Pour autant, l’ancien d’OpenAI n’a pas opté pour un statut à but non lucratif. Ni même pour celui de “public benefit corporation”, une entreprise à but lucratif qui œuvre aussi pour le bien de la société, sans obligation légale d’uniquement maximiser la création de valeur pour ses actionnaires. En outre, il est allé chercher de l’argent auprès du fonds de capital-risque Andreessen Horowitz, qui a plusieurs fois nié les dangers de l’IA.
Besoin de capitaux – Pour atteindre son objectif, SSI va avoir besoin de beaucoup plus qu’un milliard de dollars, pour attirer les meilleurs chercheurs mais surtout pour mettre la main sur l’immense puissance de calcul nécessaire à l’entraînement de son IA. Ses dirigeants ouvrent la porte à des partenariats avec Nvidia, Microsoft ou Google, offrant une partie du capital en échange de cartes graphiques ou de crédits cloud. Mais l’équation financière pourrait être difficile à tenir, car les besoins de financements vont s’accumuler en l’absence de sources de recettes liées à des produits commerciaux – comme c’est le cas, par exemple pour OpenAI, dont le chiffre d’affaires est désormais supérieur à trois milliards de dollars en rythme annuel. Et en l’absence de progrès financiers capables d’attirer de nouveaux investisseurs.
Pour aller plus loin:
– Comment la course aux profits s’est imposée dans l’intelligence artificielle
– La face cachée d’OpenAI, rattrapé par de multiples polémiques
Crédit photos: Apple – Stable Diffusion