Elon Musk s'attaque à ChatGPT
Et aussi: Nouveau plan social chez Spotify - Vers une nouvelle levée record pour Mistral AI
Elon Musk va lever un milliard de dollars pour concurrencer ChatGPT
En début d’année, Elon Musk faisait partie du millier de signataires d’un appel pour mettre en place un moratoire sur le développement de l’intelligence artificielle générative, suite au lancement du robot conversationnel ChatGPT. À peine huit mois plus tard, le multi-entrepreneur s’apprête à lever un milliard de dollars pour rivaliser avec OpenAI, Google, Anthropic et les autres acteurs du secteur. Dans un document envoyé mardi à la Securities & Exchange Commission, le gendarme financier américain, sa nouvelle start-up xAI, officiellement créée en mars, révèle avoir déjà recueilli 135 millions auprès d’investisseurs, dont l’identité n’est pas connue. Et elle explique avoir conclu un “accord contraignant et exécutoire” pour la cession des autres actions mises en vente, pour un montant de 865 millions.
Lancement de Grok – Cette méga-levée de fonds intervient un mois après le lancement de Grok, le premier chatbot conçu en quelques semaines par xAI. “À bien des égards, c’est le meilleur qui existe actuellement sur le marché”, promettait alors Elon Musk, tout en reconnaissant des performances moins élevées que GPT-4, la dernière version du grand modèle de langage développé par OpenAI. Mais le milliardaire mettait en avant un “accès en temps réel” aux messages publiés sur X, l’ancien Twitter, ce qui lui permettrait de générer ses réponses à partir des toutes dernières informations. Le robot répondrait aussi à des “questions brûlantes” que ses rivaux préfèrent ignorer. L’accès à Grok est pour le moment limité à un petit nombre d’utilisateurs aux États-Unis, abonnés à l’offre payante la plus chère de X.
Milliers de GPU – Avec un milliard de dollars dans ses caisses, xAI va pouvoir passer à la vitesse supérieure pour entraîner, puis faire tourner, des modèles d’IA encore plus puissants. La start-up va notamment pouvoir payer les milliers de processeurs graphiques (GPU) qu’elle a commandés auprès de Nvidia, pour un investissement de plusieurs centaines de millions de dollars. Elle va aussi pouvoir embaucher de nouveaux experts du domaine. Cet été, Elon Musk avait révélé l’identité des premiers employés: onze spécialistes de l’IA, tous des hommes, débauchés chez les pus grands acteurs du secteur. On y trouve majoritairement des anciens de Google ou de sa filiale DeepMind, connue pour avoir conçu une IA capable de battre des champions du jeu de go. xAI a aussi recruté des chercheurs chez OpenAI, Microsoft et Tesla.
Contre l’IA “woke” – Elon Musk s’intéresse à l’intelligence artificielle depuis des années. En 2015, il faisait partie des fondateurs d’OpenAI, avant de claquer la porte quatre ans plus tard, en raison de batailles internes sur la gouvernance. Avec xAI, ses ambitions seront d’abord commerciales, alors que l’IA générative devrait devenir un marché important: comme ses rivales, la start-up pourrait proposer ses modèles aux entreprises qui souhaitent développer de nouvelles applications. Mais l’objectif du milliardaire est aussi politique, alors qu’il s’est déjà plaint que ChatGPT et ses rivaux étaient trop “woke” – un terme péjoratif pour désigner ceux qui luttent contre les discriminations. En clair, son IA générative doit être, comme il veut le faire depuis le rachat de Twitter, le garant d’une liberté d’expression qu’il juge menacée.
Pour aller plus loin:
– Les coûts exorbitants de l’IA menacent de freiner son adoption
– OpenAI abandonne le développement de son dernier modèle de langage
Malgré ses premiers profits en deux ans, Spotify coupe à nouveau dans ses effectifs
Daniel Ek le reconnaît: le timing “peut sembler surprenant”. À peine un mois après avoir annoncé son retour dans le vert, notamment grâce à la première hausse de prix de ses abonnements, Spotify va mener un nouveau plan social. Son troisième depuis le début de l’année. Et surtout le plus important. La plateforme suédoise de streaming musical va licencier 17% de ses employés, soit environ 1.500 personnes. Elle avait déjà supprimé 600 postes en janvier, puis 200 en juin. En un an, ses effectifs ont quasiment été réduits d’un quart, revenant à leur niveau de début 2022. Pour justifier ces coupes additionnelles, le fondateur et patron de la société met en avant “l’écart entre les objectifs financiers et les coûts opérationnels”, et aussi “le chemin qu’il reste à parcourir avant d’être à la fois productifs et efficaces”.
Baisse des dépenses – Fin octobre, pourtant, le directeur financier de Spotify s’était montré optimiste, assurant avoir atteint “un point d’inflexion vers [les] objectifs de rentabilité”. La plateforme venait tout juste de renouer avec les profits pour la première fois depuis deux ans – et seulement pour la sixième fois depuis 2017, date à partir de laquelle ses comptes sont publics. Au troisième trimestre, elle a dégagé un bénéfice opérationnel de 32 millions d’euros. Un petit bénéfice, certes, qui représente une marge inférieure à 1%. Mais qui contraste avec les fortes pertes enregistrées au cours des mois précédents. Cette amélioration s’explique notamment par une forte contraction des dépenses, alors que Spotify a choisi de limiter ses investissements dans les podcasts et de réduire ses budgets marketing.
Hausse de prix – Ce nouveau plan social est d’autant plus inattendu que Spotify peut espérer une progression de son chiffre d’affaires, après avoir mis fin en juillet à sa tarification historique de dix euros par mois, ajoutant un euro de plus à son offre de base. Si elle marque une rupture, cette augmentation ne s’est pas traduite par une vague de désabonnements: son offre payante a même gagné 6 millions de clients au troisième trimestre. D’une part, parce que l’élasticité-prix, c’est-à-dire l’évolution de la demande en fonction des tarifs, est extrêmement faible, voire quasiment nulle. D’autre part, parce que Spotify n’a fait que s’aligner sur la concurrence. Comme ses rivales, la plateforme semble ainsi disposer d’une marge de manœuvre pour procéder à de nouvelles hausses de prix au cours des prochaines années.
Limite du modèle – Pour Daniel Ek, cependant, ces deux dynamiques ne sont pas suffisantes, notamment pour satisfaire les investisseurs de Wall Street. “Notre structure de coûts est encore trop importante”, assure-t-il. Il est vrai que l’équilibre reste fragile. Et les potentiels profits toujours restreints par les limites du modèle économique: les importantes royalties versées aux artistes, qui se chiffrent à plus de 70% des recettes générées par les écoutes. Pour augmenter les marges, le directeur général de Spotify a beaucoup misé sur les podcasts, n’hésitant pas à dépenser plus d’un milliard de dollars pour racheter des studios et signer des accords d’exclusivité avec des vedettes du secteur. Mais les retombées publicitaires sont encore décevantes. Plus récemment, Spotify s’est lancé à l’assaut du marché des livres audio.
Pour aller plus loin:
– Dans le streaming musical, la hausse des prix ne fait que commencer
– Pourquoi Spotify modifie son modèle de rémunération des artistes
Vers une nouvelle levée de fonds record pour Mistral AI
Six mois après son lancement, Mistral AI devrait bientôt franchir la barre des deux milliards de dollars de valorisation. Selon l’agence Bloomberg, la start-up française, spécialisée dans l’intelligence artificielle générative, va mener une nouvelle levée de fonds, lui permettant de recueillir 445 millions d’euros supplémentaires. La majorité de cette somme (325 millions) serait apportée en fonds propres, notamment par le prestigieux fonds américain Andreessen Horowitz, qui investirait à lui seul 200 millions d’euros. Le reste (120 millions) prendrait la forme d’obligations convertibles, souscrites par les géants américains Nvidia et Salesforce. Début octobre, Mistral a lancé son premier grand modèle de langage en open source disponible gratuitement et sans restriction pour tous les développeurs. D’autres modèles seront publiés “progressivement”, permettant de “réduire l’écart de performance” avec les IA génératives fermées d’OpenAI ou Google, promet la start-up.
Pour aller plus loin:
– L’Europe se déchire sur la régulation de l’IA générative
– Chute historique des levées de fonds des start-up européennes
Crédit photos: Flickr / Uk Government - Spotify