Big bang sur Android
Et aussi: Des data centers dans l'espace ? – Shein bientôt bloqué en France ?
Après sa défaite face à Epic, Google baisse ses commissions sur Android
“Une proposition formidable”. Après des années de bataille judiciaire, Tim Sweeney a définitivement fait plier Google. Mercredi, le moteur de recherche a officialisé un accord à l’amiable avec Epic Games, l’éditeur du populaire jeu vidéo Fortnite. Il s’engage notamment à faciliter l’installation de boutiques tierces d’applications sur son système Android et à réduire les commissions prélevées sur les achats et abonnements. Un arrangement qui accroît la pression sur Apple, toujours en conflit avec Epic.
Sur certains points, cet accord, qui doit encore être validé par le juge chargé du dossier, va encore plus loin que les mesures correctives imposées l’an passé. Il s’étendra jusqu’en 2032, bien au-delà des trois années initialement prévues. Et il s’appliquera, au moins en partie, à l’échelle mondiale, et non plus seulement aux États-Unis. Le géant de Mountain View conserve toutefois l’essentiel: des commissions pouvant être comprises entre 9% et 25%, pas si éloignées des taux actuels de 15% et 30%.
Pratiques anticoncurrentielles
Fin 2023, au terme d’une longue procédure, la justice américaine avait estimé que Google avait bien mis en place des pratiques anticoncurrentielles pour empêcher l’émergence de véritables rivaux à sa boutique d’applications Play Store, lui permettant de préserver ses lucratives commissions. La victoire d’Epic était cependant inattendue, car la société avait échoué, à deux reprises, à faire condamner Apple. Elle ne réclamait pas de compensation financière, mais uniquement des changements.
L’an passé, le juge avait suivi en grande partie les demandes d’Epic, imposant une série de mesures très larges, allant même plus loin que le Digital Markets Act européen. Celles-ci visaient à favoriser “l’arrivée et la croissance de concurrents au Play Store” et à atténuer les effets de réseau dont bénéficie “injustement” le magasin de Google. Le mois dernier, la Cour suprême des États-Unis avait refusé de suspendre l’application de ce verdict, dans l’attente de l’issue de la procédure d’appel.
Boutiques alternatives sur le Play Store
Concrètement, l’arrangement à l’amiable prévoit que des boutiques alternatives pourront être téléchargées directement depuis le Play Store, partout dans le monde. Cela simplifiera considérablement un processus d’installation jusqu’ici complexe, qui consolidait de facto le quasi-monopole de Google dans la distribution d’applications. En revanche, la société ne sera pas obligée de partager l’ensemble de son catalogue avec les autres magasins, contrairement à ce que le juge souhaitait imposer.
Pour les applications téléchargées depuis le Play Store, Google a ramené ses commissions à 9% ou 20%, selon des modalités qui ne sont pas précisées. Ce taux pourra être revu à la baisse en fonction des “conditions de concurrence”. Le moteur de recherche appliquera également des frais de transaction de 5%. Mais les développeurs pourront y échapper en recourant à d’autres systèmes de paiement que celui de Google, ou en redirigeant leurs utilisateurs vers un site Web pour finaliser leurs achats.
Google limite les dégâts
L’entreprise va aussi mettre fin aux pratiques qui ont été jugées anticoncurrentielles, mais seulement aux États-Unis. Elle ne pourra plus conclure d’accords financiers avec les opérateurs mobiles ou les fabricants de smartphones pour empêcher la préinstallation de boutiques rivales, ni pour afficher l’icône du Play Store à un emplacement stratégique. De plus, elle ne pourra plus rémunérer les développeurs afin qu’ils distribuent leurs applications exclusivement sur sa boutique.
Contraint de s’adapter après sa condamnation, Google semble avoir réussi à limiter l’ampleur des changements. L’impact potentiel sur son chiffre d’affaires – et sur les profits, tant le Play Store affiche des marges très élevées – est difficile à évaluer. Il dépendra de l’adoption des boutiques tierces par les utilisateurs des smartphones Android, déjà habitués au Play Store. Mais aussi par les développeurs, qui n’y trouveront pas forcément des conditions financières beaucoup plus avantageuses.
Pour aller plus loin:
– Comment Tim Sweeney a vaincu Apple et Google
– Face à Epic, Apple concède une défaite judiciaire retentissante
Google souhaite déployer des data centers dans l’espace
C’est le retour des moonshots chez Google. Mardi, le géant de Mountain View a dévoilé Suncatcher, un ambitieux projet de recherche visant à déployer des datas centers dédiés à l’intelligence artificielle générative… dans l’espace. Objectif: contourner les limites terrestres de la production d’électricité en alimentant ces serveurs grâce à l’énergie solaire. Une première phase de tests doit être menée en 2027 en partenariat avec Planet Labs, spécialiste des nanosatellites.
Défis technologiques
Concrètement, Google ambitionne de déployer une constellation d’appareils équipés de TPU, les puces maison destinées à l’IA, et positionnés sur une orbite héliosynchrone leur assurant une exposition quasi permanente au soleil. Ces datas centers spatiaux seraient interconnectés pour former un immense réseau de calcul, capable d’entraîner et de faire tourner les modèles d’IA. “Cette approche a un potentiel immense pour passer à l’échelle”, assure Travis Beals, qui supervise le projet.
Mais plusieurs défis majeurs restent à relever. Pour atteindre des performances comparables à celles des infrastructures terrestres, ces satellites devront communiquer avec des débits de plusieurs dizaines de térabits par seconde. Google estime pouvoir y arriver en faisant évoluer ses satellites à seulement 100 à 200 mètres les uns des autres. Une prouesse technologique inédite: la distance moyenne entre les satellites de Starlink, la constellation de SpaceX, est de 120 kilomètres.
Concurrence de SpaceX et Blue Origin ?
Dans l’espace, les TPU seront par ailleurs soumis à des niveaux de radiation beaucoup plus élevés, ce qui pourrait limiter leur durée de vie. La société assure que les premiers tests ont été positifs. Enfin, les coûts de lancement des satellites restent trop élevés pour que ces datas centers soient économiquement compétitifs avec les infrastructures terrestres. Google estime cependant que l’équation économique pourrait devenir viable d’ici le milieu des années 2030.
Le moteur de recherche n’est pas le seul à travailler sur un tel projet. Le mois dernier, la start-up américaine Starcloud a lancé un satellite de test équipé d’un GPU H100 de Nvidia. Un autre société, Relativity Space, partage la même ambition. Elle aurait été rachetée en mai par Eric Schmidt, l’ancien patron de Google. La semaine dernière, Elon Musk a aussi expliqué que SpaceX pourrait déployer des data centers en orbite. Même chose pour Jeff Bezos, avec sa société spatiale Blue Origin.
Pour aller plus loin:
– L’essor fragile des néo-clouds, entre croissance rapide et endettement massif
– Faute de puissance de calcul, OpenAI repousse le lancement de nouveaux modèles
Le gouvernement français demande le blocage de Shein
Le scandale de trop pour Shein ? Alors que la plateforme chinoise d’ultra fast fashion vient d’ouvrir son premier magasin permanent à Paris, elle pourrait être bloquée en France. Le gouvernement a en effet saisi la justice après la découverte de la vente de poupées sexuelles à l’apparence enfantine et d’armes de catégorie A. Face à cette menace, l’entreprise a annoncé la suspension temporaire des ventes réalisées par des vendeurs tiers.
Dans le collimateur de Bruxelles
Surtout connu pour ses innombrables collections de vêtements vendus à bas prix, Shein a diversifié son offre. La plateforme propose désormais des appareils électroniques, des jouets, des bijoux ou encore des produits de beauté. Ce catalogue repose en partie sur une marketplace, ouverte à une multitude de vendeurs, principalement basés en Chine, et soumise à des contrôles très limités. Résultat: une proportion importante des produits ainsi commercialisés ne respecte pas les normes européennes.
Au-delà de la France, Shein et sa rivale Temu restent dans le collimateur de la Commission européenne, qui cherche à déterminer si elles respectent le Digital Services Act. Cette réglementation leur impose notamment de lutter contre la vente de contrefaçons, de produits dangereux ou non conformes aux normes européennes. En cas d’infraction, elles risquent une amende pouvant aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires mondial. Et même, une interdiction sur le continent en cas de récidive.
Pour aller plus loin:
– Bousculé sur les prix, Amazon reprend les recettes de Shein et Temu
– Temu et Shein perdent leur exemption douanière aux États-Unis
Crédit photos: Unsplash / Mika Baumeister – Planet Labs



