L'IA partout, tout le temps
Microsoft lance des "PC IA" - Google déploie l'IA sur son moteur - Nouvelle méga-levée de fonds en France
Pour relancer les ventes, Microsoft lance des PC optimisés pour l'IA
Ne les appelez plus des “PC IA”, mais des PC Copilot+. Lundi, en ouverture de sa conférence Build, Microsoft a levé le voile sur ce nouveau label attribué à certains ordinateurs Windows, qui intègrent une quarantaine de modèles d’intelligence artificielle générative. Et qui ouvrent ainsi la voie à de nouvelles fonctionnalités au niveau du système d’exploitation, et plus seulement au niveau des applications. Autre avancée: ces AI peuvent tourner localement, c’est-à-dire sans aller chercher de la puissance de calcul sur une plateforme de cloud. Une évolution cruciale qui doit permettre de bâtir des applications fonctionnant hors connexion, et surtout ne générant plus de coûts d’inférence, dont la facture peut rapidement grimper. Les premiers appareils seront lancés en juin. Toutes les grandes marques ont répondu présentes.
Relancer les ventes – L’IA représente potentiellement une innovation majeure sur un secteur qui en manque cruellement. Les fabricants d’ordinateurs, comme ceux de smartphones, comptent donc énormément sur ces nouvelles machines pour accélérer le rebond des ventes, après deux années de chute brutale. Et aussi pour augmenter le prix de vente moyen de 10 à 15%, selon les prédictions du cabinet Canalys. Microsoft estime que 50 millions de PC Copilot+ devraient être vendus au cours des douze premiers mois, soit environ 20% du marché. Ces ordinateurs représenteront plus de la moitié des achats dès 2026, anticipe Canalys. L’adoption devrait d’abord être tirée par les entreprises, d’autant plus que beaucoup d’entre elles commencent à remplacer les appareils achetés pendant la pandémie, et doivent anticiper la fin du support de Windows 10.
Historique géant – Au-delà du buzz généré par l’IA générative depuis le lancement de ChatGPT fin 2022, Microsoft va devoir démontrer l’intérêt de ces nouveaux PC pour les utilisateurs. Le groupe de Redmond mise notamment sur une nouvelle fonctionnalité, baptisée Recall, qui ressemble à un historique géant de tout ce qui a été vu ou fait, permettant de retrouver facilement des informations. Il met aussi en avant une option de sous-titrage et de traduction automatique vers l’anglais, par exemple de vidéos YouTube. Et il impose aux fabricants une touche dédiée permettant de lancer son assistant d’IA Copilot. Microsoft revendique par ailleurs le soutien de développeurs importants, en particulier Adobe, ce qui permettra d’utiliser les fonctionnalités d’IA de ses logiciels de retouche photo sans être connecté à Internet.
Architecture ARM – Pour faire tourner ces services d’IA en local, Microsoft a mené à bien une autre révolution, longtemps repoussée mais désormais devenue indispensable. L’éditeur de Windows a en effet délaissé les processeurs x86, cadenassés par Intel et AMD, et qui affichent un cruel manque de puissance de calcul, pour basculer vers l’architecture ARM. La puce des premiers PC Copilot+ a été conçue par Qualcomm. Elle est couplée à une carte graphique (GPU) mais aussi à un accélérateur de réseaux de neurones (NPU). Microsoft suit ainsi la voie ouverte en 2020 par Apple, qui a remplacé les processeurs d’Intel par des CPU ARM maison, obtenant des gains de puissance et d’autonomie. Ses dirigeants ne cachent d’ailleurs pas leur espoir de mieux rivaliser avec le groupe à la pomme, multipliant les comparaisons avec les Mac.
Pour aller plus loin:
– Après deux années de chute, le marché du PC renoue avec la croissance
– Nvidia ambitionne de concurrencer Intel sur le marché des CPU
Google intègre l'IA générative au sein de son moteur de recherche
Vingt-cinq ans après son lancement, Google connaît le changement le plus radical de son histoire. La semaine dernière, le moteur de recherche a entamé le déploiement à grande échelle de réponses générées par l’intelligence artificielle au sein de ses résultats – d’abord aux États-Unis et “prochainement” dans d’autres pays. Une évolution qu’il a mis du temps à concrétiser, contrairement à Microsoft, qui a très vite ajouté l’IA à son moteur Bing. Non seulement parce que la technologie commet encore de nombreuses erreurs factuelles. Mais aussi parce qu’elle menace ses profits. Les rumeurs autour du lancement d’un outil de recherche par OpenAI, le concepteur de ChatGPT, ont certainement accéléré son calendrier. Tout comme le succès de la start-up Perplexity AI, qui propose un outil de recherche repensé pour tirer profit de l’IA.
Au-dessus des liens – Google promet que l’IA va offrir une “expérience de recherche entièrement repensée”. Concrètement, un module baptisé “AI Overview” s’affiche désormais en haut de la page de résultats pour certaines requêtes, au-dessus des traditionnels liens et extraits de site Internet. Ce texte structuré, citant plusieurs sources, est généré par Gemini, le grand modèle de langage de la société. L’IA sera aussi capable de construire l’intégralité d’une page en classant dans différentes catégories des suggestions de restaurants, films ou recettes. Ou encore de planifier un voyage en utilisant Maps et en allant chercher des informations nécessaires directement sur un compte Gmail. Enfin, il sera possible de poser une question avec une vidéo, par exemple pour comprendre pourquoi un appareil électronique ne fonctionne plus.
Inertie des internautes – L’IA générative n’a pas encore eu un impact majeur pour Google. Mais elle pourrait rebattre les cartes sur un secteur verrouillé par le géant de Mountain View – 91% de part de marché, selon Statcounter. Aux États-Unis, il a d’ailleurs perdu un peu de terrain face à Bing. Perplexity revendique plus de dix millions d’utilisateurs mensuels. Et la menace la plus sérieuse pourrait venir d’OpenAI. Face à cette nouvelle concurrence, le leader du marché peut compter sur l’inertie des internautes, qui mettent du temps à modifier des habitudes bien ancrées. Liz Reid, la nouvelle directrice de Google Search, met aussi en avant sa base de données de plus de “1.000 milliards de faits” et son “incomparable système de classement”, qui doivent permettre de faire remonter les informations les plus pertinentes.
Version payante ? – L’émergence de l’IA représente un danger pour le modèle économique de Google. D’une part, les coûts d’inférence pourraient se traduire par un surcoût potentiel de 6 milliards de dollars par an, soit 8% des profits réalisés en 2023, selon les analystes de Morgan Stanley. D’autre part, l’intégration de l’IA pourrait provoquer une baisse du nombre de clics. Or, l’empire publicitaire de Google est bâti sur les liens sponsorisés, vendus aux annonceurs pour apparaître tout en haut de la page de résultats. Certes, le groupe teste quelques idées pour intégrer des publicités dans les réponses fournies par l’IA. Mais ces nouveaux formats ne seront pas adaptés à toutes les recherches. Selon le Financial Times, ses dirigeants réfléchissent ainsi à rendre payant l’accès à certaines fonctionnalités.
Pour aller plus loin:
– Avec l’aide de Microsoft, OpenAI veut concurrencer Google
– Perplexity AI, la start-up qui veut “ringardiser Google”
La start-up française H lève 220 millions de dollars pour ses modèles d'IA
Après Mistral AI et Poolside AI, voilà H. Mardi, à peine quelques mois après sa création, la start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle générative, jusqu’ici connue sous le nom de code Holistic AI, a officialisé une première levée de fonds d’un montant de 220 millions de dollars, dont environ 130 millions en obligations convertibles, selon les informations de l’agence Bloomberg. Fondé par quatre anciens ingénieurs de DeepMind, le très réputé laboratoire britannique en IA racheté en 2014 par Google, H ambitionne de concevoir des systèmes multi-agents, une alternative aux grands modèles centralisés développés par presque tous les acteurs du secteur. Ceux-ci consistent à diviser les tâches en plusieurs sous-tâches prises en charge par des modèles plus petits travaillant ensemble – et potentiellement moins onéreux. La societe, qui a déjà embauché 25 chercheurs et ingénieurs, vise le marché grand public et professionnel. Un accord commercial a déjà été conclu avec le champion roumain de l’automatisation UiPath, qui fait partie de ses investisseurs.
Pour aller plus loin:
– Pour partir à l’assaut d’OpenAI, Mistral AI abandonne (en partie) l’open source
– Xavier Niel lance Kyutai, un laboratoire d’IA à but non lucratif
Crédit photos: Microsoft - Google