La course contre la montre d'Apple
Et aussi: PayPal rêve d'une seconde jeunesse - Google va indemniser les possesseurs d'Android
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Apple engagé dans une course contre la montre pour continuer à vendre ses Watch
Dans l’attente d’un hypothétique veto présidentiel, Apple prend les devants. Jeudi, la marque à la pomme va suspendre la vente de ses dernières Watch sur son site Internet aux États-Unis. Puis, elle les retirera des rayons de ses boutiques juste après Noël. Sa montre connectée est en effet sous le coup d’une interdiction de commercialisation et d’importation, prononcée par l’International Trade Commission, une agence américaine notamment chargée de trancher les litiges sur les brevets. À très court terme, son seul espoir repose sur un geste de la Maison blanche, qui dispose d’un droit de veto sur les décisions de l’ITC – un droit utilisé une seule fois au cours des dix dernières années, déjà au profit d’Apple. Faute de quoi, la société de Cupertino devra apporter au plus vite des modifications matérielles ou logicielles.
Niveau d’oxygène – Cette mesure concerne les deux derniers modèles, sortis en septembre. Apple pourra encore vendre la version d’entrée de gamme. Les autres distributeurs peuvent continuer à commercialiser tous les modèles, mais ils ne pourront théoriquement pas importer de nouveaux exemplaires, une fois leurs stocks écoulés. À l’origine de cette interdiction: le fabricant américain d’appareils médicaux Masimo, qui accuse Apple d’avoir débauché plusieurs de ses ingénieurs puis d’avoir violé ses brevets sur la mesure du niveau d’oxygène dans le sang – une fonctionnalité ajoutée à la montre connectée en 2020. En mai, la société avait réclamé plus de 3 milliards de dollars de réparations devant un tribunal californien. Mais le jury n’avait pas réussi à se mettre d’accord sur un verdict. L’affaire pourrait donc être rejugée.
Moindre mal – Fin octobre, Masimo avait cependant obtenu gain de cause devant l’ITC. L’agence avait confirmé l’avis rendu en janvier par l’une de ses juges, qui avait estimé que l’oxymètre présent dans l’Apple Watch violait bien deux brevets du fabricant d’appareils médicaux. Une période de 60 jours s’était alors ouverte pendant laquelle la Maison blanche pouvait – et peut encore – faire jouer son droit de veto. Celle-ci s’achève le 25 décembre. Un moindre mal pour Apple: ses montres sont restées disponibles pour les achats de Noël, une période cruciale pour les ventes d’appareils électroniques. À l’inverse, les premiers mois de l’année représentent une période creuse. La société peut aussi compter sur les stocks constitués par les distributeurs pour limiter, au moins à court terme, l’impact commercial de cette interdiction.
Changer des composants ? – La voie la plus rapide pour résoudre le problème serait de conclure un accord à l’amiable. Interrogé par Bloomberg, le patron de Masimo se dit ouvert à ce scénario. Mais les dirigeants d’Apple ne semblent pas privilégier cette option. Ils cherchent, au contraire, à apporter des changements à l’Apple Watch pour ne plus violer les brevets de leur opposant. Ils espèrent y parvenir en modifiant le software de la montre. “Je ne pense pas que cela puisse fonctionner”, répond le responsable de Masimo, qui souligne que les brevets concernent le hardware. Cela signifie qu’Apple pourrait être contraint de modifier certains composants de sa Watch. Un processus qui pourrait prendre plusieurs mois. Sans compter les délais administratifs liés à l’examen de ces modifications par l’ITC. Puis, la relance de la production.
Pour aller plus loin:
– Google dévoile sa première montre connectée
– Comment l’Europe a forcé Apple à changer le chargeur de l’iPhone
Pour ses 25 ans, PayPal rêve d'une seconde jeunesse
“Nous sommes un peu les dinosaures du paiement en ligne”, sourit Francis Barel, le président de la filiale française de PayPal. En décembre, la première fintech vedette de l’histoire a soufflé sa vingt-cinquième bougie. Un anniversaire qui coïncide aussi avec une nouvelle ère pour la société basée à San José, à la recherche d’une seconde jeunesse passée l’euphorie post-Covid. En début d’automne, un nouveau patron est arrivé. Sa mission ne s’annonce pas facile: contenir une concurrence toujours plus féroce tout en redonnant un coup de fouet à un cours boursier en chute libre depuis le plus haut historique touché en 2021. À cette époque, PayPal voyait alors très grand, promettant d’atteindre 750 millions d’utilisateurs actifs dans le monde. Trop grand: cet objectif est désormais abandonné.
Plusieurs vies – À 25 ans, PayPal a déjà connu plusieurs vies. La première sous le nom de Confinity jusqu’à la fusion avec x.com, la start-up d’Elon Musk. Ses dirigeants de l’époque formeront ensuite la “PayPal mafia”, qui créera ou investira dans de nombreuses start-up emblématiques. Sa deuxième vie débute en 2002 avec le rachat, pour 1,5 milliard de dollars, par eBay, la plateforme d’enchères qui représente alors la quasi intégralité de son activité. “C’est à ce moment-là que nous avons décidé de nous développer en dehors d’eBay”, souligne Francis Barel. Treize ans plus tard, lorsque la société retrouve son indépendance – et fait son entrée en Bourse –, son ancienne maison mère cumule moins de la moitié de ses transactions. Cette troisième vie s’est achevée en septembre avec le départ de son patron Dan Schulman, en poste depuis huit ans.
1.100 milliards de dollars – Son successeur, Alex Chriss, un ancien dirigeant de l’éditeur de logiciels financiers Intuit, prend les commandes d’un géant des paiements: 1.100 milliards de dollars de transactions sur les neuf premiers mois de l’année. Plus de 80% de cette somme provient de l’activité historique, permettant de payer des achats en ligne avec un compte PayPal. Depuis trois ans, la société permet de régler en quatre fois sans frais, répondant au succès du paiement fractionné. Elle a aussi diversifié son offre, en partie grâce à des acquisitions. Avec Braintree, elle gère en marque blanche les paiements de grandes plateformes, comme Airbnb, Booking et Uber. “C’est notre activité qui affiche la plus forte croissance”, note Francis Barel. Avec Zettle, elle offre des terminaux de paiement aux commerces physiques.
Concurrence – Mais PayPal reste un géant fragile. En début d’année, il a licencié 2.000 personnes, soit 7% de ses effectifs. Et ses marges restent sous pression. Cela s’explique en partie par la croissance de Braintree, qui affiche des commissions plus faibles sur les transactions. Mais aussi par une intense compétition, d’Apple Pay à Stripe, qui a contraint le groupe à baisser certains de ses tarifs. “Nous affrontons une concurrence accrue sur chacun de nos secteurs d’activité, reconnaît Francis Barel. Cela nous oblige à innover constamment”. Depuis son arrivée, Alex Chriss a ainsi demandé à ses équipes de travailler sur des améliorations et de nouvelles fonctionnalités pouvant être lancées début 2024, rapporte le site The Information. Notamment pour les PME, un segment que PayPal a peut-être trop négligé jusque-là.
Pour aller plus loin:
– Après des pertes record, Klarna renoue enfin avec la rentabilité
– Stripe lève 6,5 milliards de dollars mais divise sa valorisation par deux
Google va indemniser les possesseurs d'Android aux États-Unis
Trois mois après son annonce, les détails de l’accord à l’amiable conclu entre Google et les Etats américains ont enfin été rendus publics. Le moteur de recherche, accusé de pratiques anticoncurrentielles dans la distribution d’applications sur son système Android, a accepté de verser 700 millions de dollars, dont 630 millions pour alimenter un fonds de compensation des consommateurs. Un moindre mal pour le géant américain, qui génère plus de 10 milliards de dollars de profits par an grâce aux commissions qu’il prélève sur les applications. Et qui a aussi pu négocier des changements minimes de ses règles, limitant ainsi leur impact. Google s’est notamment engagé à autoriser les développeurs utiliser un système de paiement alternatif, sur lequel il continuera de ponctionner des commissions légèrement inférieures (11% et 26% au lieu de 15% et 30%). Ses pratiques pourraient cependant être remises en cause par la justice suite à sa récente défaite judiciaire contre Epic Games.
Pour aller plus loin:
– Face à Epic, Google concède une défaite judiciaire retentissante
– Bruxelles se prépare à une bataille judiciaire contre Apple et Google
Crédit photos: Apple - PayPal