Le coup de pression de Microsoft
Et aussi: Le dérapage de trop d'Elon Musk ? - Cruise change de pilote
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Entre Microsoft et OpenAI, l'avenir de Sam Altman reste incertain
Quatre jours après avoir été écarté à la tête d’OpenAI, l’avenir de Sam Altman reste encore bien incertain. Si Microsoft a d’ores et déjà annoncé son recrutement, pour créer une nouvelle division consacrée à l’intelligence artificielle, celui-ci ne désespère en effet toujours pas de retrouver son poste de directeur général du concepteur de ChatGPT. Peut-être grâce à la mobilisation de ses anciens employés, qui menacent quasiment tous de démissionner. Cette hypothèse a été confirmée lundi par Satya Nadella, lors de deux interviews accordées consécutivement à CNBC et à Bloomberg TV. “Je suis ouvert aux deux options”, a indiqué le patron de l’éditeur de Windows, premier actionnaire de ChatGPT, assurant que le plus important était de “continuer à travailler avec Sam, peu importe où il se trouve”.
Plan B – Dimanche, Satya Nadella avait tenté de convaincre le conseil d’administration de revenir sur sa décision. Sans succès. L’enjeu est immense pour le groupe de Redmond, qui a bien plus à perdre que les 13 milliards de dollars qu’il s’est engagé à investir: toutes ses initiatives dans l’IA générative dépendent des modèles de son partenaire. Or, la nouvelle direction de la start-up semble vouloir ralentir le rythme de développement et le déploiement commercial de la technologie, estimant qu’une approche plus prudente est nécessaire compte tenu de ses dangers. Pour éviter de mauvaises surprises et s’assurer de rester compétitif face à Google notamment, Microsoft a donc activé, au moins sur le papier, un plan B: recruter Sam Altman, et une partie de son équipe de chercheurs, avant qu’il ne lance une nouvelle start-up.
Un coup de pression ? – Ce revirement stratégique a été célébré comme un coup de génie par de nombreux observateurs, permettant de fait à la société de mettre la main, à moindres frais, sur des experts réputés. Mais cette annonce pourrait tout aussi bien constituer un gigantesque coup de pression sur le conseil d’administration de la start-up. Si Satya Nadella ne l’indique pas ouvertement, un retour aux commandes de Sam Altman chez OpenAI reste en effet la meilleure solution pour Microsoft. Elle présente l’avantage de la continuité, s’appuyant sur tout ce qui a déjà été bâti en un an, comme l’assistant Copilot qui va intégrer la majorité des produits maison, plutôt que de repartir quasiment d’une feuille blanche en interne – et de réinvestir plusieurs milliards de dollars pour concevoir ses propres modèles d’IA générative.
Exode massif – La pression mise par Microsoft est accentuée par le soutien indéfectible des employés d’OpenAI à leur ancien patron. Lundi, plus de 90% d’entre eux ont réclamé son retour et la démission du conseil d’administration. Faute de quoi, ils menacent de quitter l’entreprise, potentiellement pour rejoindre la nouvelle division créée par Microsoft, qui a déjà proposé des postes à certains d’entre eux. Parmi les signataires: Ilya Sutskever, le directeur scientifique et membre du conseil. “Je regrette profondément ma participation aux actions du conseil”, explique-t-il, assurant désormais vouloir tout faire pour “réunir l’entreprise.” S’ils campent sur leurs positions, les administrateurs d’OpenAI pourraient ainsi se retrouver à la tête d’une entreprise exsangue, délaissée par son principal partenaire et par ses employés.
Pour aller plus loin:
– OpenAI abandonne le développement de son dernier modèle de langage
– Les coûts de l’IA menacent de freiner son adoption
De nombreux annonceurs boycottent à nouveau Twitter
Le dérapage de trop pour Elon Musk ? Ces derniers jours, de grands annonceurs américains ont décidé de suspendre leurs investissements publicitaires sur X, l’ancien Twitter. C’est le cas notamment d’Apple, Disney, IBM ou encore de Warner Bros Discovery. En cause, des messages du nouveau propriétaire du réseau social donnant du crédit à des théories du complot antisémites, relayées par l’extrême droite américaine. “Une promotion répugnante de la haine antisémite et raciste”, selon la Maison blanche. Depuis, les tentatives de défense du milliardaire, et celles de Linda Yaccarino, la directrice générale de X, n’ont rien changé. D’autant qu’un article, publié en fin de semaine dernière par l’organisation Media Matters, montre que des publicités ont été affichées à côté de messages pro-nazis.
Chute du chiffre d’affaires – Depuis son rachat il y a un peu plus d’un an, ce n’est pas la première fois que le réseau est touché par un mouvement de boycott des annonceurs. L’an passé, beaucoup avaient choisi de faire une pause, en attendant de voir à l’œuvre la politique de modération beaucoup plus laxiste promise par Elon Musk. En mai, l’arrivée de Linda Yaccarino, l’ancienne directrice de la publicité de NBCUniversal, l’un des géants américains des médias, avait été bien accueillie par le secteur publicitaire. Petit à petit, les marques ont repris leurs investissements sur X, assure régulièrement la société. Mais en septembre, Elon Musk reconnaissait que le chiffre d’affaires publicitaire, qui reste sa principale source de revenus, affichait toujours une chute de 60% aux États-Unis, de très loin le marché le plus lucratif.
Risque de réputation – Les derniers messages polémiques d’Elon Musk illustrent le danger qu’il fait peser sur la santé financière de X. Le milliardaire ne cesse de répéter qu’il continuera “à dire ce qu’il veut”, assurant se battre pour défendre la liberté d’expression qu’il estime menacée. “Si cela me fait perdre de l’argent, ainsi soit-il”, assurait-il en mai. Pour les grands annonceurs, cette posture représente un énorme risque de réputation, redoutant d’être associés à la promotion de discours haineux. Pour le moment, ce risque était, parfois, compensé par la crainte d’être pointé du doigt par Elon Musk, prenant à témoin ses 164 millions de suiveurs. L’an passé, Apple avait ainsi choisi de reprendre ses campagnes publicitaires sur X. Mais il n’est pas certain que cette menace de name & shame fonctionne encore bien longtemps.
Système de contrôle - D'autant plus que l'image de marque de la plateforme ne cesse de se dégrader, à mesure qu'elle semble dériver vers l'extrême droite. La création d'un programme de rémunération des utilisateurs participe à cette tendance, encourageant les contenus clivants ou la désinformation pour cumuler les vues. Pour rassurer les annonceurs, ses dirigeants ont annoncé cet été la mise en place d'un nouveau système de contrôle, leur permettant de s'assurer que leurs publicités n'apparaissent pas à côté de messages problématiques. Un système qui n'a visiblement pas fonctionné, selon Media Matters. X, qui conteste les conclusions de l’organisation, vient de porter plainte. En attendant, ce nouveau boycott menace de retarder le retour à l’équilibre - avant le paiement d'un milliard de dollars d'intérêts -, annoncé depuis des mois.
Pour aller plus loin:
– Avec Threads, Twitter fait face à un premier rival d’envergure
– Twitter bientôt payant ? Un pari très risqué pour Elon Musk
Au point mort, Cruise change de patron pour redémarrer
Changement de pilote au volant de Cruise. Dimanche, la filiale de General Motors spécialisée dans les voitures autonomes a officialisé la démission de Kyle Vogt, son directeur général depuis 2022. Aucun remplacement n’a encore été nommé par sa maison mère. Ce départ intervient après des semaines cauchemardesques pour la société, qui a dû suspendre l’ensemble de ses opérations aux États-Unis, suite à plusieurs accidents très médiatisés. Pour Cruise, la priorité est désormais de “rebâtir la confiance”, reconnaît Mary Barra, la patronne de GM, dans un message adressé aux salariés. Pour y arriver, elle promet de mettre en avant “la sécurité, la transparence et la responsabilité”. Fondé il y a dix ans, Cruise fait partie – ou faisait partie – des groupes les plus avancés dans le domaine des voitures sans conducteur. Engagés dans une course de vitesse pour enfin générer du chiffre d’affaires, ses dirigeants semblent cependant avoir ignoré plusieurs signaux d’alarme.
Pour aller plus loin:
– Comment les voitures autonomes de Cruise ont foncé droit dans le mur
– Google tente de préserver les secrets de ses voitures autonomes
Crédit photos: Microsoft - Flickr / Daniel Oberhaus