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Le DSA européen affronte son premier test d’envergure
Moins de deux mois après son entrée en vigueur, le Digital Services Act (DSA) fait face à son premier test d’envergure: la guerre provoquée par l’attaque du Hamas en Israël. La nouvelle législation européenne sur les services numériques impose en effet de nouvelles obligations en matière de modération des réseaux sociaux, notamment pour lutter contre la désinformation et les campagnes d’influence. Le conflit déclenché le week-end dernier représente donc un test pour Meta, la maison mère de Facebook, et pour Twitter, deux plateformes propices à la diffusion de fausses informations, rappelées à l’ordre par Thierry Breton, le commissaire au marché intérieur. Mais un test aussi pour Bruxelles, pour démontrer sa capacité à véritablement faire respecter ses règles.
Lourdes amendes – Le DSA ne touche pour le moment que les “très grandes plateformes”, qui cumulent plus de 45 millions d’utilisateurs au sein de l’Union européenne. Facebook, Instagram, YouTube, TikTok et Twitter en font partie. Les contraintes les plus lourdes concernent la modération. Toutes ces plateformes, alimentées par leurs utilisateurs, doivent proposer un outil de signalement des contenus problématiques. Elles doivent retirer les messages illégaux. Et limiter la diffusion de fausses informations – sans pour autant devoir impérativement les supprimer. Ces obligations s’appliquent dans les 24 langues de l’UE. En cas d’infraction, le DSA prévoit des amendes pouvant atteindre 6% du chiffre d’affaires mondial. Et même une interdiction sur le continent en cas de violations répétées.
Ultimatums – Depuis samedi, de nombreuses fausses vidéos ont été publiées sur Twitter, générant parfois des millions de vues. “Votre plateforme est utilisée pour diffuser des contenus illégaux et de la désinformation”, a souligné mardi Thierry Breton dans un courrier envoyé à Elon Musk, le nouveau propriétaire du réseau à l’oiseau bleu. Le commissaire européen cite notamment “des images anciennes provenant d’autres conflits armés ou des séquences militaires provenant de jeux vidéo”. Et il réclame “une réponse rapide, précise et complète” dans les 24 heures. Mercredi, dans un message adressé à Mark Zuckerberg, l’ancien ministre français a demandé à Meta des explications, là aussi dans les 24 heures, sur des fausses vidéos non retirées en marge des élections, fin septembre, en Slovaquie.
Twitter, le plus vulnérable – Dans les faits cependant, ces deux ultimatums ne sont pas contraignants, car ils ne sont pas prévus dans le cadre du DSA. Une éventuelle amende ne sera pas infligée avant plusieurs mois d’enquête de la Commission. Et une improbable interdiction pas avant un long processus judiciaire. Les responsables européens semblent surtout vouloir occuper le terrain médiatique, pour mettre les plateformes devant leurs responsabilités. Et pour ne pas être accusés d’immobilisme. Leurs actions dans les prochains mois seront beaucoup plus parlantes. Sur le papier, Twitter apparaît le plus vulnérable, alors que la société a taillé violemment dans ses équipes de modération, au profit de l’intelligence artificielle et d’un système de “notes de la communauté”, qui n’a pas pleinement convaincu Bruxelles.
Pour aller plus loin:
– Bruxelles rappelle Twitter à l’ordre après l’entrée en vigueur du DSA
– Pourquoi Zalando attaque le DSA devant la justice européenne
Huawei anticipe un rebond spectaculaire de ses ventes de smartphones
Éphémère numéro un mondial, Huawei retrouve des ambitions sur le marché des smartphones. Trois ans après l’entrée en vigueur d’importantes sanctions américaines, qui ont fait plonger son activité, le groupe chinois anticipe désormais un fort rebond de ses ventes en 2024, tablant sur des livraisons comprises entre 60 et 70 millions d’unités, indique le quotidien japonais Nikkei. L’an passé, il n’avait écoulé que 30 millions de terminaux, selon les estimations du cabinet IDC. Ce regain d’optimisme s’explique en grande partie par le lancement, fin août, du Mate 60 Pro, son premier smartphone 5G depuis 2020. Date à laquelle les États-Unis l’ont placé sur une liste noire, l’empêchant notamment d’acheter des puces 5G auprès de Qualcomm, le premier fournisseur mondial dans le domaine.
Élan patriotique – Le Mate 60 Pro représente un tournant pour Huawei, bien au-delà de son potentiel commercial. Pour le produire, la société de Shenzhen a en effet déjoué les restrictions de Washington. Sa division HiSilicon a conçu son propre processeur 5G, gravé en 7 nm par SMIC, une première à grande échelle pour un fondeur chinois, selon les conclusions du cabinet TechInsights. Depuis, la marque a présenté plusieurs autres appareils intégrant cette puce, dont les performances suscitent de nombreuses spéculations. Les analystes estiment que leurs ventes devraient être tirées par un élan patriotique, célébrant une avancée technologique majeure pour le pays. D’autant plus qu’Apple, qui a beaucoup profité des déboires de Huawei depuis trois ans, se retrouve désormais dans le viseur de Pékin.
“Cycle normal de lancement” – Une inconnue demeure: les véritables capacités de production de SMIC, et donc de Huawei. Des observateurs estiment qu’elles sont limitées, notamment en raison d’un taux de rendement (le pourcentage de puces opérationnelles après gravure) très faible. Les analystes de SemiAnalysis se montrent plus optimistes. Mais le rebond des ventes de Huawei ne repose pas seulement sur ses smartphones 5G. Il avait d’ailleurs déjà commencé avant leur lancement: +41% au premier trimestre, +58% au deuxième trimestre, selon les estimations du cabinet Counterpoint. Ces performances s’expliquent par un retour à “un cycle normal de lancement”, après une période de transition pendant laquelle le groupe chinois a dû reconstruire presque intégralement son réseau de fournisseurs.
Absence d’Android – Si Huawei ne semble plus trop limité par son stock de composants, il reste toujours plombé hors de Chine par l’interdiction d’utiliser le système Android de Google. Ses smartphones sont désormais équipés d’un OS maison, baptisé Harmony. Mais ils n’ont plus accès au Play Store, l’indispensable boutique d’applications mobiles, ce qui restreint sévèrement l’intérêt des consommateurs. Ce problème ne se pose pas en Chine où le Play Store n’est pas disponible. Malgré une nette amélioration, le groupe chinois restera donc encore très loin de son apogée touché en 2019, lorsqu’il avait écoulé plus de 240 millions de smartphones dans le monde. Au deuxième trimestre 2020, le dernier avant l’entrée en vigueur des sanctions américaines, il avait même dépassé Samsung.
Pour aller plus loin:
– Comment Huawei a pris sa revanche sur les États-Unis
– Meng Wanzhou prend la tête d’un Huawei redevenu ambitieux, mais toujours menacé
Crédit photos: Unsplash / Brett Jordan - Huawei