Le tour de passe-passe d'Apple
Et aussi: Baidu sous la menace ? - OpenAI lance son "app store"
Comment Apple a court-circuité Masimo, qui l'accuse de violation de brevets
En attendant de remporter sa bataille judiciaire contre le fabricant américain d’appareils médicaux Masimo, qui l’accuse de violation de brevets, Apple s’apprête à le court-circuiter. Aux États-Unis, le groupe à la pomme va désactiver, sauf jugement favorable ces prochains jours, la fonctionnalité de sa montre Watch permettant de mesurer le niveau d’oxygène dans le sang, au cœur de la procédure lancée par son opposant. Ce tour de passe-passe va ainsi lui permettre d’obtenir la levée de l’interdiction d’importation et de commercialisation de son appareil, entrée en vigueur juste après Noël puis temporairement suspendue quelques jours plus tard par la justice. De quoi lui octroyer un délai supplémentaire pour trouver une solution à plus long terme, sans interrompre ses ventes. Mais en perdant un argument marketing.
Ingénieurs débauchés – Le conflit entre les deux entreprises a débuté avant même le lancement d’un oxymètre sur l’Apple Watch en 2020. Masimo reproche au géant de Cupertino d’avoir débauché plusieurs de ses ingénieurs, puis d’avoir enfreint sa propriété intellectuelle en utilisant sa méthode pour mesurer le taux d’oxygène. En mai dernier, la société avait réclamé plus de 3 milliards de dollars de réparations devant un tribunal californien. Mais le jury n’avait pas réussi à se mettre d’accord sur un verdict. L’affaire pourrait donc être rejugée. Fin octobre, Masimo avait, en revanche, obtenu gain de cause devant l’International Trade Commission, une agence américaine chargée de trancher les litiges sur les brevets. La Maison blanche avait ensuite refusé d’utiliser son droit de veto sur cette décision.
Pas d’accord à l’amiable ? – Selon l’ITC, l’Apple Watch viole bien deux brevets détenus par Masimo. De quoi justifier une interdiction à la vente. Celle-ci a commencé le 25 décembre. Un moindre mal pour Apple: ses montres sont restées disponibles pour les achats de Noël, une période cruciale pour les ventes d’appareils électroniques. À l’inverse, le début d’année représente une période creuse. Reste que le groupe devait trouver une solution pour sortir de cette interdiction, alors que ses dirigeants ne semblent pas privilégier un accord à l’amiable avec le fabricant d’appareils médicaux. Apple se heurtait à un double problème. D’une part, une modification logicielle, pour mesurer différemment le niveau l’oxygène, aurait pu être retoquée. D’autre part, une modification matérielle aurait pris plusieurs mois.
Impact limité – En retirant l’oxymètre de sa montre, Apple a choisi de ne pas prendre de risques, lui permettant ainsi de limiter considérablement l’impact du jugement de l’ITC. Si elle s’inscrit dans un positionnement axé sur le bien-être, la fonctionnalité n’est en effet pas la première motivation d’achat pour l’immense majorité des consommateurs. Ses ingénieurs vont désormais pouvoir travailler, sans grande pression, sur une alternative. Si celle-ci est logicielle, elle pourra être déployée sur tous les exemplaires vendus ces prochaines semaines. Si celle-ci est matérielle, la société pourrait même décider d’attendre le lancement de la prochaine version de la Watch, très probablement à l’automne. Apple espère toujours obtenir gain de cause sur le terrain auprès de l’ITC, devant lequel il vient de faire appel.
Pour aller plus loin:
– Google dévoile sa première montre connectée
– Comment l’Europe a forcé Apple à changer le chargeur de l’iPhone
PARTENAIRE
Paris s'apprête à accueillir Retail Data Day
Le Retail Data Day, événement organisé le 6 février prochain à Paris par Diamart Connect, revient pour sa troisième édition, mettant en lumière l'impact croissant de la data et de l'IA dans le secteur du retail.
Après une année 2023 éprouvante, marquée par une pression économique sans précédent et des réajustements budgétaires drastiques, le retail aborde 2024 avec un impératif de performance pour renouer avec la rentabilité. La data se révèle être le levier incontournable pour atteindre une précision et une productivité optimales. Cependant, la question demeure : de quelle data parle-t-on réellement ?
Les détaillants sont confrontés à un double défi : non seulement devenir réellement "Data driven" en exploitant des données fiables et accessibles pour éclairer chaque décision, mais aussi intégrer l'IA pour améliorer et innover dans leurs pratiques. Si le premier enjeu relève plus de l'organisationnel, le second, plus complexe, touche à la R&D et exige une veille constante.
Le Retail Data Day de 2024 s'attellera à ces problématiques avec deux tables rondes consacrées à l'IA et à la culture data. Des leaders du secteur partageront leurs perspectives sur l'utilisation concrète de la data dans des domaines variés comme le marketing client, la tarification et la chaîne d'approvisionnement.
Baidu (faussement ?) accusé de liens avec l'armée chinoise dans l'IA
Révélations explosives ou erreur d’interprétation ? Dans un article publié en fin de semaine dernière, le South China Morning Post affirmait que l’armée chinoise avait établi un “lien physique” avec Baidu dans le domaine de l’intelligence artificielle générative, s’appuyant notamment sur un article scientifique publié fin décembre par un laboratoire de recherche militaire. Mais depuis, cette formulation a été retirée par le quotidien basé à Hong Kong, reconnaissant implicitement son erreur. Qu’importe: l’action du moteur de recherche, qui a fermement démenti ces spéculations, a chuté de plus de 11% lundi. La raison ? Les investisseurs chinois s’inquiètent de potentielles sanctions américaines contre Baidu, qui pourraient avoir un impact conséquent sur son fonctionnement et ses principales activités.
Restrictions d’exportation – Cet épisode pourrait au final n’être qu’anecdotique. Mais il illustre le risque qui pèse sur tous les groupes chinois spécialisés dans l’intelligence artificielle. À tout moment, ils peuvent en effet se retrouver ciblés par Washington, lancé dans une bataille pour empêcher Pékin d’utiliser les progrès technologiques à des fins militaires. À l’automne 2022, la Maison blanche a imposé de sévères restrictions d’exportation vers la Chine des puces les plus avancées, notamment celles qui permettent d’entraîner les derniers modèles d’IA générative, ainsi que des équipements nécessaires à leur production. Ces mesures ont été renforcées l’an passé pour refermer les failles dans lesquelles s’était notamment engouffré Nvidia. Et elles ont été suivies par les Pays-Bas et le Japon.
Prédire les mouvements – L’article scientifique publié par le laboratoire lié à l’armée chinoise pourrait donner de nouveaux arguments aux États-Unis. Celui-ci décrit en effet des tests visant à utiliser de grands modèles de langage dans le processus de décision stratégique. Exemples: prédire les prochains mouvements des troupes ennemies ou déterminer le positionnement idéal des soldats. Les auteurs de l’étude concluent cependant que les modèles grand public ne sont pas encore très utiles dans le domaine. Mais ils soulignent qu’un processus d’entraînement, guidé par des experts militaires, pourrait leur permettre de gagner en efficacité. Deux modèles ont été testés: Ernie, conçu par Baidu, et Spark, développé par iFlyTek, une société spécialisée dans la reconnaissance vocale.
Liste noire – Baidu dément tout lien avec ce laboratoire, et assure ne pas avoir connaissance de son projet de recherche. “Si notre grand modèle de langage a été utilisé, cela a été la version publiquement disponible en ligne”, promet-il. En étant associé à l’armée, le groupe risque de se retrouver dans le collimateur de Washington. Et d’être placé sur une liste noire qui lui interdirait toute relation commerciale avec des entreprises américaines et des entreprises étrangères utilisant des technologies américaines. En perte de vitesse, Baidu a pivoté l’an passé vers l’IA générative. Avec succès: son chatbot Ernie est considéré comme le plus avancé en Chine – où les rivaux occidentaux, comme ChatGPT et Bard de Google, ne sont pas disponibles. La société revendique plus de 100 millions d’utilisateurs par mois.
Pour aller plus loin:
– Malgré les sanctions américaines, Huawei lance de nouvelles puces d’IA
– Dans l’IA, Baidu assure “ne pas être inférieur” à ChatGPT
OpenAI lance sa première boutique de chatbots
Après plusieurs mois de délai, OpenAI a officiellement lancé la semaine dernière son “app store” de l’intelligence artificielle générative. Cette boutique permet aux abonnés payants de ChatGPT de télécharger des déclinaisons du robot conversationnel conçues pour une utilisation précise. La start-up américaine explique que 3 millions de chatbots ont déjà été créés, mais elle ne précise pas combien d’entre eux sont aussi disponibles sur son nouveau magasin. Le programme de partage des revenus promis par OpenAI devrait, lui, être lancé au premier trimestre. Ses modalités de rémunération ne sont pas encore connues. Cette boutique avait été dévoilée début novembre. Selon plusieurs indiscrétions, elle aurait été l’un des éléments ayant déclenché la crise de gouvernance à la tête de la start-up, de l’éviction soudaine de son patron Sam Altman à son retour quelques jours plus tard.
Pour aller plus loin:
– OpenAI abandonne le développement de son dernier modèle de langage
– ChatGPT fait perdre plus de 500 millions de dollars à OpenAI
Crédit photos: Apple - Baidu