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Pourquoi Samsung ne parvient toujours pas à rivaliser avec TSMC
Au printemps 2022, Samsung annonçait en grande pompe une avancée majeure: une première puce gravée en 3 nm, soit 0,000003 millimètre. Et en profitait pour réaffirmer son ambition de rattraper TSMC, le premier fondeur mondial de semi-conducteurs. Un an et demi plus tard, c’est pourtant son grand rival taïwanais qui est le premier à produire en masse un processeur mobile doté de cette finesse de gravure – la puce A17 Pro équipant les derniers iPhone Pro d’Apple. Le groupe sud-coréen, lui, peine toujours à perfectionner son processus de production, pour atteindre un taux de rendement acceptable pour ses clients, rapporte le grand quotidien coréen Chosun Ilbo. Un contretemps supplémentaire après la perte de contrats, aussi importants financièrement que symboliquement, avec Qualcomm et Nvidia.
1,4 nm en 2027 ? – Surtout connu pour ses appareils grand public, Samsung est aussi le numéro un mondial des puces mémoires. Et possède une activité de fonderie (fabrication de puces conçues par d’autres). Ce marché du “fabless” est nettement dominé par TSMC, qui capte plus de la moitié des ventes – et même 90% pour les puces les plus avancées. Samsung reste à bonne distance: sa part de marché se situe autour de 15%. Et près de la moitié de ses commandes proviennent… des autres divisions de l’entreprise. La société espérait prendre de vitesse son concurrent sur les puces gravées en 3 nm. Elle promet toujours une finesse de gravure de 2 nm en 2025, soit en même temps que TSMC. Puis de seulement 1,4 nm deux ans plus tard, un objectif sur lequel le groupe taïwanais ne s’est pas encore engagé.
Investissements – Depuis l’an passé, Samsung a subi deux revers majeurs. Nvidia est en effet passé chez TSMC pour la production de ses derniers modèles de cartes graphiques. Tout comme Qualcomm pour ses nouveaux processeurs mobiles. Malgré tout, ses dirigeants restent très ambitieux. L’an passé, ils affirmaient vouloir détrôner TSMC d’ici à 2030. Pour y parvenir, ils mènent de gigantesques plans d’investissements pour construire des centres de recherche et des usines de pointe. Mais leur rival investit tout autant, si ce n’est plus. Il possède aussi une avance technologique, affiche de meilleures performances industrielles et peut compter sur des clients satisfaits et fidèles. Avant de penser à rattraper TSMC, Samsung devra d’abord contenir les assauts d’Intel, qui vient de lancer une activité de fonderie.
Taux de rendement – La finesse de gravure est primordiale: plus elle est faible et plus le nombre de transistors est élevé. Cela permet de fabriquer des composants plus puissants et moins énergivores. Selon Samsung, ses puces en 3 nm réduisent la consommation d’énergie de 45% et augmentent les performances de 23% par rapport au 5 nm. Pour les produire, le groupe a opté pour une nouvelle architecture, quand TSMC a préféré repousser cette transition à sa prochaine génération. Selon le Chosun Ilbo, le taux de rendement (le pourcentage de puces opérationnelles après gravure) navigue autour des 50%, quand Qualcomm exige au moins 70%. Si la production en masse est espérée l’an prochain, les prochains Galaxy S de Samsung devraient, encore, être équipés de processeurs gravés par… TSMC.
Pour aller plus loin:
– Pourquoi les profits de Samsung s’effondrent
– Apple prend du retard sur le développement de ses puces 5G
Amazon lance (enfin) ses premiers satellites pour rivaliser avec SpaceX
Avec près d’un an de retard, Amazon franchit une première étape importante vers le déploiement de sa constellation de minisatellites. Vendredi, le géant américain du commerce en ligne a lancé puis placé en orbite les deux premiers appareils expérimentaux de son projet Kuiper, qui vise à fournir un accès à Internet à très haut débit. Et donc à rivaliser avec l’offre Starlink de SpaceX, opérationnelle depuis 2021 et qui compte déjà plus de deux millions d’abonnés dans le monde. “La route reste encore longue”, reconnaît Rajeev Badyal, le responsable technologique du programme. La société espère désormais pouvoir accélérer les cadences l’année prochaine, ce qui ne dépend pas que d’elle. Si aucune date n’est encore avancée, le lancement commercial du service n’est pas attendu avant plusieurs années.
Régions reculées – Dans un premier temps, Amazon prévoit de déployer un peu plus de 3.200 satellites sur une orbite basse – 590 kilomètres contre 36.000 kilomètres pour les traditionnels satellites géostationnaires. Selon sa convention avec le gendarme américain des télécoms, elle doit en lancer la moitié avant juillet 2026. Et l’intégralité avant 2029. Elle espère ensuite placer 4.500 appareils supplémentaires. Sa constellation doit connecter les régions qui ne le sont pas encore, notamment celles qui sont trop isolées pour rentabiliser la construction d’une infrastructure terrestre. En 2021, Amazon a signé un premier partenariat d’envergure avec l’opérateur américain Verizon. À terme, elle pourrait aussi concurrencer la fibre optique partout ailleurs. Un marché potentiellement gigantesque.
Handicap – Amazon prévoit d’investir “au moins” dix milliards de dollars dans le projet Kuiper. Mais l’entreprise part avec un handicap de taille sur SpaceX: elle ne dispose pas de ses propres lanceurs. L’an passé, elle a signé des contrats avec trois sociétés: Blue Origin, le groupe spatial de Jeff Bezos, son fondateur et ex-patron, l’européenne Arianespace et United Launch Alliance, une coentreprise regroupant Boeing et Lockheed Martin. Au total, cela représente 83 missions étalées sur cinq ans – à partir d’une date non communiquée. Mais Amazon ne contrôlera pas le calendrier des lancements. Et sera surtout dépendant des avancées technologiques de ses partenaires. Trois des quatre fusées qui doivent transporter ses satellites, dont Ariane 6 et New Glenn de Blue Origin, sont toujours en développement.
Modèle économique – Pour des raisons symboliques et concurrentielles, Amazon a choisi de ne pas faire appel à SpaceX, dont les lanceurs multiplient les missions. Une décision qui pourrait se traduire par des délais et des coûts supplémentaires, dénoncent des actionnaires. D’autres redoutent des investissements à perte, alors que le projet Kuiper compte des années de retard sur Starlink et sur OneWeb, racheté par l’opérateur français Eutelsat. Surtout, la pertinence du modèle économique reste à démontrer, parce que la durée de vie des satellites n’est que de quelques années. Et parce que le prix des abonnements limite le potentiel commercial. L’an passé, Starlink a généré un chiffre d’affaires de 1,4 milliard de dollars, rapporte le Wall Street Journal. Dans ses projections initiales, SpaceX misait sur 12 milliards.
Pour aller plus loin:
– SpaceX va investir jusqu’à 30 milliards de dollars pour son projet Starlink
– Comment OneWeb espère contrer les satellites de SpaceX
Crédit photos: Samsung - Amazon