Bataille de lobbying autour d'iMessage
Et aussi: Cruise fonce dans le mur - Cityscoot en grande difficulté
Pourquoi iMessage se retrouve au coeur d’une bataille de lobbying à Bruxelles
C’est une histoire de bulles bleues et de bulles vertes. Mais aussi bien plus que cela. Ces dernières semaines, iMessage est au coeur d’une intense bataille de lobbying auprès de la Commission européenne, qui doit décider si l’application de messagerie d’Apple, qui remplace par défaut les SMS sur tous ses smartphones, doit être soumise au Digital Markets Act, la nouvelle réglementation communautaire qui vise à renforcer la concurrence dans le secteur du numérique. Un scénario que souhaite à tout prix éviter le groupe à la pomme, car cela l’obligerait à rendre son service interopérable avec ses rivaux. Et surtout avec le système Android de Google. Il espère en effet conserver un argument marketing particulièrement efficace, notamment chez les moins de 30 ans pour les convaincre d’acheter ou de conserver leur iPhone.
Google allié aux opérateurs – Le camp d’en face est donc logiquement mené par Google. Voilà des années que le moteur de recherche milite pour que son grand rival adopte le protocole non propriétaire RCS, qu’il a déployé avec l’appui des opérateurs pour remplacer les SMS. Cela permettrait aux utilisateurs de smartphones Android de bénéficier des mêmes fonctionnalités que les possesseurs d’iPhone lorsqu’ils discutent avec eux. Dans son combat à Bruxelles, le groupe américain est épaulé par quatre géants européens des télécoms: le français Orange, le britannique Vodafone, l’allemand Deutsche Telekom et l’espagnol Telefonica. Dans un courrier commun envoyé la semaine dernière à la Commission, ils affirment qu’il ne fait “aucun doute” qu’iMessage doit être considéré comme un “service essentiel”. Et donc être réglementé par le DMA.
“Passerelle” – Adopté il y a un an, le DMA doit entrer en vigueur le 6 mars. Il vise les géants du numérique, appelés “gatekeepers”, qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 7,5 milliards d’euros en Europe – ce qui est bien entendu le cas d’Apple. Mais le texte ne s’applique pas à tous leurs services, seulement à ceux qui sont dits “essentiels”, car représentant une “passerelle” entre les entreprises et leurs clients. Les services qui comptent au moins 45 millions d’utilisateurs sur le continent ou 10.000 clients professionnels sont présumés remplir ce critère. Si le groupe reconnaît qu’iMessage dépasse ces barrières, il conteste en revanche son rôle de “passerelle”, compte tenu de sa taille en Europe. En septembre, Bruxelles a lancé une enquête pour étudier la question. Son verdict est attendu en février.
“Verrouiller les utilisateurs” – Lancée en 2011, iMessage est plébiscité par certains utilisateurs, en particulier aux États-Unis. Dès le départ, la société de Cupertino a décidé de ne pas rendre son service compatible avec les messages envoyés depuis des smartphones Android. Cela se traduit par de nombreuses fonctionnalités manquantes dans les discussions pour ceux qui n’utilisent pas un iPhone. Par exemple, les conversations ne sont pas chiffrées et les vidéos affichent une très mauvaise qualité. Cette différence est accentuée par la couleur des bulles dans laquelle apparaissent les messages: bleu pour ceux envoyés depuis un iPhone, vert pour les autres. Malgré les critiques, le groupe n’a pas l’intention de changer. Et pour cause; “iMessage permet de verrouiller les utilisateurs”, reconnaissait un ancien dirigeant.
Pour aller plus loin:
– Six géants technologiques ciblés par le Digital Markets Act européen
– Bruxelles se prépare déjà à une bataille judiciaire contre Apple et Google
Comment les voitures autonomes de Cruise ont foncé droit dans le mur
Cela devait être la consécration pour Cruise. En août, la filiale de General Motors spécialisée dans les voitures autonomes avait enfin obtenu l’autorisation des autorités californiennes pour lancer un service payant de robots-taxis dans les rues de San Francisco, sans aucune restriction sur la taille de sa flotte ni sur ses horaires d’exploitation. À peine trois mois plus tard, cette étape majeure s’est transformée en véritable cauchemar. Après plusieurs accidents très médiatisés, la société a en effet perdu son permis en Californie. Elle a dû suspendre l’ensemble de ses opérations. La production de nouveaux véhicules a été interrompue par sa maison mère. Et elle s’apprête à mener un plan social, a confirmé son patron Kyle Vogt, lors d’une réunion organisée lundi avec les employés, explique Forbes.
Rachat par GM – Fondée il y a dix ans, Cruise fait alors partie d’une génération de start-up qui ambitionne de développer des voitures sans conducteur, dans le sillage des premières Google Car. Le tournant de son histoire intervient trois ans plus tard, quand la jeune entreprise est rachetée par General Motors, pour un montant estimé à un milliard de dollars. Le géant de l’automobile lui permet de prendre une autre dimension, disposant désormais d’importantes ressources pour embaucher massivement et financer sa R&D. D’autant qu’elle lève ensuite plusieurs milliards auprès d’investisseurs extérieurs, dont Softbank et Microsoft. L’an passé, elle a commencé à transporter des passagers dans ses véhicules sans la présence d’un opérateur pouvant reprendre le contrôle en cas de d’urgence.
Un million de robots-taxis – Cruise est alors engagée dans une course de vitesse. D’abord, contre Waymo, la filiale de Google, pionnière du secteur, ou encore Zoox, rachetée par Amazon en 2020. Et ensuite contre le temps, alors que ses pertes s’accumulent – près de deux milliards de dollars, par exemple, sur les neuf premiers mois de l’année. Ses dirigeants se montrent très ambitieux. En début d’année, ils projetaient d’atteindre la barre du milliard de dollars de chiffre d’affaires en 2025. Puis, celle des 50 milliards en 2030, en déployant plus d’un million de véhicules aux États-Unis, au Japon ou encore à Dubaï pour remplacer Uber et les taxis. Pour y parvenir, l’entreprise a conçu son propre robot-taxi, baptisé Origin et pensé spécifiquement pour le transport de passagers, sans volant ni pédale.
Sécurité négligée – Dans cette course de vitesse, Cruise semble cependant avoir oublié le plus important : la sécurité. Selon le New York Times, Kyle Vogt aurait par exemple refusé l’an passé, après un accident, d’éviter les rues dotées d’un couloir de bus , estimant qu’il était nécessaire d’accumuler les kilomètres de tests pour s’améliorer. Après d’autres révélations du quotidien américain, Cruise a aussi admis que ses voitures autonomes réclamait une assistance humaine tous les six à huit kilomètres. Mais la société entretient encore le flou sur l’accident intervenu début octobre – une piétonne renversée – qui a précipité la suspension de son permis en Californie. Pis, les autorités de l’État affirment avoir initialement reçu une vidéo montée de la part de la société, ne montrant pas l’intégralité de la séquence.
Pour aller plus loin:
– Uber abandonne son projet de robots-taxis
– Google tente de préserver les secrets de ses voitures autonomes
En difficulté, Cityscoot se déclare en cessation de paiement
Un an après sa dernière levée de fonds, Cityscoot est à nouveau en grandes difficultés financières. Mercredi, la start-up française de location de scooters électriques en libre-service s’est déclarée en cessation de paiement auprès du tribunal de commerce de Paris. Cette procédure doit lui permettre de se donner de l’air le temps de trouver un nouvel investisseur. Cityscoot explique avoir besoin de lever de l’argent frais pour financer le renouvellement de sa flotte de 2.500 scooters à Paris. Un projet “essentiel pour la rentabilité du modèle et pour atteindre les objectifs de [son] business plan 2025”. Lancée en 2016, l’entreprise est présente dans la région parisienne, mais aussi à Nice, Bordeaux et Milan. Après avoir souffert pendant la crise sanitaire, elle subit désormais l’arrivée de concurrents, comme Yego et Cooltra, avec lesquels elle va se partager le marché à Paris suite à un appel d’offres conclu cette été.
Pour aller plus loin:
– Spin, symbole de l’histoire mouvementée des trottinettes électriques
– En quête d’économies, Tier abandonne ses scooters électriques
Crédit photos: Apple - Cruise