Des humanoïdes dans les entrepôts d'Amazon
Et aussi: Deux start-up chinoises rattrapées par Washington
Amazon teste un robot humanoïde dans ses entrepôts
C’est une nouvelle étape que s’apprête à franchir Amazon dans l’automatisation de ses entrepôts. Dans un centre de recherche situé dans la banlieue de Seattle, à proximité de son siège social, le géant américain du commerce en ligne teste en effet un robot humanoïde capable d’attraper et de déplacer des objets. Baptisé Digit, celui-ci pourrait bientôt assister les préparateurs de commandes en se chargeant de “tâches très répétitives”, indique Scott Dresser, vice-président de la branche dédiée à la robotique. Et de promettre que l’objectif sera de “libérer les employés” et non de les remplacer. Cette expérimentation s’inscrit dans un processus entamé il y a plus de dix ans, qui affiche des résultats impressionnants: plus de 750.000 robots sont déjà déployés dans les 175 centres de distribution d’Amazon.
Bacs en plastique – Développé depuis 2018 mais présenté dans sa version actuelle en début d’année, Digit a été conçu par la start-up américaine Agility Robotics, dans laquelle Amazon avait investi en 2022. En septembre, elle a lancé la construction de sa première usine, capable de produire 10.000 robots par an. Digit peut marcher vers l’avant, vers l’arrière et aussi latéralement. Il peut s’accroupir et porter des objets pesant jusqu’à 16 kilos. Et aussi travailler 16 heures par jour. Initialement, Amazon prévoit de l’utiliser pour aller ranger des bacs en plastique vides, utilisés dans la préparation des commandes. D’autres cas d’usage pourraient être testés plus tard. “Il existe une grande opportunité pour développer une solution de manipulateur mobile [dans les entrepôts]”, prédit Scott Dresser.
Déplacer les chariots – Amazon a pris le tournant de la robotique en 2012 avec le rachat de la start-up Kiva Systems, depuis renommée Amazon Robotics, pour 775 millions de dollars. Dans ses entrepôts, l’automatisation n’a cessé de progresser: dans certains centres, on compte ainsi quasiment autant de robots que d’employés. Celle-ci prend la forme de la petite machine à roue Proteus, qui déplace des chariots au milieu des opérateurs humains, quand les précédents modèles étaient cantonnés à des zones dédiées pour éviter les accidents. Et aussi de deux bras robotisés, appelés Sparrow et Cardinal, qui peuvent saisir des objets et des colis. La semaine dernière, la société a dévoilé un nouveau système, baptisé Sequoia, combinant ces deux technologies pour réduire les délais de stockage et de préparation.
Économies – Dans ses discours autour de l’automatisation des entrepôts, Amazon met souvent en avant la réduction des risques d’accident et de blessure de ses employés. Ce phénomène présente aussi d’autres avantages pour l’e-commerçant. Il lui a permis d’enregistrer d’importants gains de productivité, participant à l’amélioration de la vitesse de livraison des commandes – un argument commercial capital face à la concurrence –, et de stocker davantage de produits sur les mêmes surfaces. Le déploiement des robots a aussi réduit les besoins en main-d’œuvre. Si Amazon a continué à embaucher massivement dans ses entrepôts, l’explosion de la demande aurait dû s’accompagner de recrutements plus importants. Tout cela se traduit par des économies, que la société n’a jamais chiffrées officiellement.
Pour aller plus loin:
– Elon Musk dévoile son robot humanoïde
– Face à la baisse de ses ventes, Amazon ferme des entrepôts
Washington sanctionne deux start-up chinoises, rivales potentielles de Nvidia
Pour exclure la Chine des progrès de l’intelligence artificielle, les États-Unis ne se contentent plus de limiter sévèrement l’exportation de puces avancées et des équipements nécessaires à leur production. La semaine dernière, en marge d’un durcissement de leurs sanctions, ils ont aussi coupé les ailes de Biren Technology et Moore Threads, en les plaçant sur une liste noire qui leur interdit toute relation commerciale avec quasiment tous les acteurs du secteur. Ces deux start-up sont considérées comme les meilleurs espoirs du pays pour concevoir des alternatives aux cartes graphiques (GPU) américaines. Et ainsi pour fournir aux entreprises chinoises ces indispensables composants devant leur permettre de continuer à entraîner et à faire tourner leurs derniers modèles d’IA générative.
Menace pour Nvidia ? – Fondée en 2019 par des ingénieurs passés chez Nvidia et Qualcomm, Biren est la plus avancée des deux. La société “représente une menace plus grande à la domination de Nvidia qu’Intel, AMD ou Graphcore”, notait l’an dernier le cabinet SemiAnalysis, citant un employé du géant américain des GPU. Quelques mois plus tôt, Biren avait dévoilé un premier accélérateur dédié à l’IA, assurant offrir des performances trois fois supérieures à la puce A100 de Nvidia, qui était alors la référence du marché. Créée un an plus tard, également par des anciens de Nvidia, Moore Threads a lancé cette année la production de ses premières cartes graphiques, dont une est dédiée à l’IA générative. Les deux start-up ont respectivement levé 4,7 et 3,5 milliards de yuans, soit 605 et 450 millions d’euros.
Coupées de TSMC – Dans un contexte de tensions géopolitiques entre Pékin et Washington, Biren et Moore Threads affichent un point faible. Comme presque toutes les sociétés chinoises, elles sont dépendantes de technologies étrangères. Cela les place à portée de fusil des États-Unis, dont les sanctions s’appliquent aussi aux entreprises asiatiques ou européennes qui utilisent des technologies américaines. C’est en particulier le cas de TSMC, le fondeur taïwanais, leader incontesté sur la production des puces les plus avancées. L’an passé, le groupe avait déjà suspendu la fabrication des GPU de Biren, qui dépassaient les seuils fixés par la Maison blanche – qui ont depuis été abaissés. Désormais, la start-up ne pourra même pas faire produire des composants moins puissants, sauf très improbable feu vert américain.
Impact seulement temporaire ? – Leur placement sur la liste noire de Washington, sur laquelle figure déjà Huawei, va compliquer d’autres tâches pour Biren et Moore Threads. Par exemple, le design de leurs GPU alors que les principaux outils sont édités par des groupes américains. De quoi rassurer Nvidia ? Depuis des mois, la société de Santa Clara ne cesse de clamer que les restrictions d’exportation vont se traduire par une accélération des efforts chinois pour développer des puces rivales, capables de gagner des parts de marché en dehors de leurs frontières. L’impact des sanctions pourrait ainsi n’être que temporaire, alors que le fondeur chinois SMIC commence à maîtriser la gravure en 7 nm. Et que Huawei développe ses propres logiciels de design et travaille sur des machines de photolithographie.
Pour aller plus loin:
– Les États-Unis interdisent à Nvidia d’exporter ses GPU vers la Chine
– Comment Huawei a pris sa revanche sur les États-Unis
Crédit photos: Amazon - Biren Technology